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Actualités juridiques du 15 octobre 2024



Rubrique Droit des sociétés




Les conséquences de l’intervention de la société absorbante d’une partie à un procès


La société TAG conclut un contrat de location de véhicules, mais cesse de régler les montants dus. Elle est condamnée au paiement de plusieurs factures, et fait appel de la décision. Par des conclusions du 15 octobre 2021, elle demande le règlement de diverses sommes par le loueur.


Le 20 juillet 2022, l’entreprise de location est absorbée par la société Fraikin France. Celle-ci intervient à l’instance par des conclusions du 18 septembre 2022, pour venir aux droits de la société absorbée. La société TAG ne dépose pas d’autres conclusions.


La Cour d’appel estime alors que la demandeuse aurait dû formuler ses demandes à l’encontre de la société Fraikin France, la société absorbée ayant été radiée. La demandeuse conteste cet arrêt. Elle se fonde sur la règle qui prévoit que lorsque la fusion-absorption se réalise au cours de la procédure engagée contre la société absorbée et que la société absorbante intervient à l'instance, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de droit d'agir de la société absorbée est écartée.


Toutefois, cet argument est insuffisant. La Cour de cassation confirme que lorsqu’une opération de fusion-absorption se réalise en cours d’instance, l’intervention de la société absorbante permet bien d’écarter la fin de non-recevoir tirée de la disparition du droit d’agir de la société absorbée. En revanche, elle ne dispense pas l’autre partie de présenter ses demandes à l’encontre de la société absorbante.


Ainsi, même si l’intervention de l’absorbante permet la poursuite du procès, les demandes doivent tout de même être expressément formulées à son encontre. Ici, la société TAG aurait dû déposer de nouvelles conclusions adressées à la société Fraikin France, après son intervention.


Cass. com. 18-09-2024 n° 23-13.453



Rubrique Focus Droit des sociétés




Précisions sur les formalités nécessaires à la cession d’actions de sociétés non cotées


Dans deux arrêts rendus le même jour, la Cour de cassation a apporté des précisions intéressantes sur les modalités de réalisation d’une cession d’actions.


1/ Le cessionnaire d’actions d’une SAS n’est pas actionnaire tant qu’il n’y a pas eu d’inscription en compte


Des époux acquièrent des actions d’une SAS, et les statuts sont modifiés en conséquences. Les cessionnaires participent à plusieurs assemblées générales en tant qu’actionnaires.


Par la suite, ils demandent la désignation d'un mandataire ad hoc chargé de convoquer une assemblée générale. Le cédant et la société contestent cette demande, estimant que les cessionnaires n'ont pas la qualité d'associé.


La Cour d’appel juge pourtant que les actions ont bien été transmises. Elle applique l’article 1583 du Code civil, qui prévoit que la vente est parfaite et la propriété acquise à l’égard de l’acheteur dès que la chose et le prix ont été fixés, même si le prix n’a pas encore été payé. Elle s’appuie également sur la modification des statuts et la participation des cessionnaires à plusieurs AG.


Mais la Cour de cassation confirme le raisonnement du cédant : lorsqu'il s'agit de la cession d'actions d'une société non cotée en bourse, le transfert de propriété se réalise lorsque les actions sont inscrites, soit sur le compte individuel de l'acheteur, soit sur les registres de la société. Par conséquent, l’obtention de la qualité d’actionnaire dépend de cette inscription, et la conclusion d’un contrat de cession est insuffisante.


La Cour précise aussi que cette inscription est faite à la date fixée par les parties et notifiée à la société émettrice. Cette date ne peut être antérieure à la notification faite à la société émettrice. Celle-ci risque d’ailleurs de voir sa responsabilité engagée si cette date n’est pas celle fixée par les parties.


Cass. com., 18-09-2024, n° 23-10.455


2/ Le formulaire Cerfa signé par le cédant d’actions vaut ordre de mouvement


Une cession d’actions est conclue, et les deux parties signent un formulaire Cerfa n° 2759 déclarant l’opération à l'administration fiscale. Cette cession est transcrite sur le registre des mouvements de titres de la société et sur le compte d'actionnaire de l’acquéreur.


Toutefois, le vendeur conteste ensuite avoir cédé ses actions, car il n’a pas signé d’ordre de mouvement. En effet, les statuts de la société énoncent que la transmission d’actions s’opère par la signature d’un ordre de mouvement par le cédant, puis l'inscription sur le registre des mouvements de titres.


La Cour de cassation approuve la position énoncée en appel. Si l'inscription au registre des mouvements de titres doit effectivement s'effectuer au vu d'un ordre de mouvement signé par le cédant, aucun texte législatif ou réglementaire ne régit la forme et le contenu de ce document. Par conséquent, le formulaire Cerfa signé par le cédant, et qui comporte toutes les informations nécessaires pour inscrire la cession sur le registre des mouvements de titres et le compte d'actionnaire, vaut ordre de mouvement.


Cass. com., 18-09-2024, n° 22-18.436


À retenir : 

1/ Le transfert de propriété d’actions est effectif à la date d’inscription sur le compte individuel de l'acheteur ou sur les registres de la société. Cette date ne peut être antérieure à celle fixée par les parties et notifiée à la société.

2/ Un formulaire Cerfa n° 2759 dûment complété et signé par le cédant peut valoir ordre de mouvement.

Ordre de mouvement vs formulaire Cerfa n° 2759

Rubrique Droit social




L’envoi d’un compte-rendu de CSE est-il suffisant pour informer le salarié sur le motif économique en cas de CSP ?


Le Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP) doit être proposé aux salariés dont le licenciement économique est envisagé dans les entreprises de moins de 1000 salariés ou si l'entreprise est en redressement ou liquidation judiciaire. Le salarié est libre de l’accepter ou non. Mais avant sa décision, il doit recevoir une information écrite et détaillée sur le motif économique de la rupture de son contrat. Ce document doit indiquer les difficultés économiques en cause et leur conséquence précise sur l'emploi du salarié.


Ici, le salarié avait reçu un e-mail avec le compte-rendu d’une réunion des représentants du personnel. Ce mode d’information est recevable à condition qu’il contienne les précisons requises. Or, la Cour de cassation relève que l’e-mail et le compte-rendu ne mentionnaient pas l'incidence des difficultés économiques invoquées sur l'emploi de la salariée. Par conséquent, l'employeur n'a pas satisfait à son obligation d'informer le salarié du motif économique de la rupture, avant son acceptation du Contrat de Sécurisation Professionnelle.


La précaution à prendre : vérifier que le CR de réunion des élus est suffisamment complet. À défaut, la rupture est dépourvue de cause réelle et sérieuse.


Cass. soc. 11-09-2024 no 22-18.629



Rubrique Bon à savoir




La mention du recours à un médiateur de la consommation était déjà obligatoire à peine de nullité avant 2021 dans les contrats conclus hors établissements


En 2016, un particulier signe un bon de commande d’une pompe à chaleur, après un démarchage à domicile. Il réalise un emprunt bancaire pour financer ce projet. L’acquéreur sollicite ensuite la nullité des deux contrats, évoquant l’irrégularité du bon de commande. Il soutient notamment que le document aurait dû mentionner le médiateur à la consommation dont relève le vendeur.


La Cour d’appel rejette cette demande, en estimant que les textes applicables à cette date (avant l’ordonnance du 29 septembre 2021) ne prévoyaient pas l’obligation à peine de nullité d’inclure cette mention dans le bon de commande.


Mais la Cour de cassation retient que la combinaison des anciens articles L. 111-1, L. 221-5 et L. 221-9 du Code de la consommation et de l’article L. 242-1 de ce code engendrait bien l’obligation d’inclure cette mention à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.


Conclusion : vos bons de commande signés hors établissement avant 2021 encourent l’annulation s’ils ne contiennent pas l’information relative au médiateur.


Cass. 1ʳᵉ civ., 18-09-2024, n° 22-19.583


La prescription de l’action de l’assuré est-elle interrompue par un courrier sollicitant une expertise ?


En 2011, le propriétaire d’un bien immobilier déclare un sinistre à son assureur, et sollicite la mise en œuvre de la garantie « catastrophe naturelle ». La compagnie d’assurance refuse, en contestant l'origine naturelle des désordres. En 2018, l’assuré l’assigne en référé afin d’obtenir une expertise judiciaire, puis en 2020 pour l’indemnisation des conséquences du sinistre. L’assureur lui oppose la prescription de l’action.


Or, selon l'article L. 114-2 du Code des assurances, l'interruption de la prescription de l'action de l'assuré peut résulter de l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception adressée à l'assureur en ce qui concerne le règlement de l'indemnité.


La Cour d’appel constate que le délai de prescription avait couru jusqu'au 6 novembre 2015, du fait de l’envoi de différents courriers. Mais elle refuse la prise en compte d’un courrier du 28 septembre 2015, par lequel l’assuré sollicitait de l'assureur une procédure d’expertise par un tiers et proposait les noms de trois experts. En effet, elle juge que ce courrier n'était pas relatif au règlement de l'indemnité, et qu’il n’interrompait donc pas la prescription.


La Cour de cassation casse cet arrêt. Selon elle, en sollicitant une nouvelle mesure d'expertise, l’assuré réclamait l'exécution de la garantie au titre des conséquences du sinistre. Sa lettre avait donc bien interrompu la prescription.


Cass. 2ᵉ civ., 19-09-2024, n° 22-22.720



Travail pendant un congé de maternité : pas de rappel de salaire


Une salariée exerce une action contre son employeur, soutenant avoir été contrainte de travailler durant des périodes de congé de maternité et d’arrêt-maladie. De ce fait, elle estime avoir été privée d'une augmentation de salaire accordée à l'ensemble des salariés. Elle demande donc des rappels de salaire, une indemnité pour travail dissimulé et de dommages-intérêts.


La Cour d’appel rejette ses demandes en paiement d'un rappel de salaire et indemnité pour travail dissimulé, et la Cour de cassation confirme cette décision. Elle rappelle que l'exécution d’un travail au cours des périodes de suspension du contrat de travail (arrêt-maladie ou congé de maternité) engage la responsabilité de l'employeur et donne lieu à réparation du préjudice subi. La Cour fait ainsi une nouvelle application du principe de la réparation automatique (cf. newsletter du 17 septembre 2024). En revanche, ce préjudice se résout uniquement par l’allocation de dommages-intérêts, et non d’un rappel de salaire.


De plus, sauf accord collectif plus favorable, les éventuelles augmentations de salaire applicables ne sont pas dues pour la période du congé de maternité. L'employeur n'est tenu de les verser qu'à l'issue de ce congé, pour la période postérieure à celui-ci.


Cass. soc., 02-10-2024, n° 23-11.582



Rubrique Flash infos




➥ Le Premier ministre, Michel Barnier, a présenté son programme social lors de sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale, le 1ᵉʳ octobre 2024. Il a notamment annoncé l’anticipation de l’augmentation du Smic de 2 % dès le 1ᵉʳ novembre 2024 (soit 2 mois avant l’augmentation légale prévue le 1ᵉʳ janvier 2025).


➥ Le 8 octobre 2024, le Conseil a mis à jour de la liste de l'UE des pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales. Antigua-et-Barbuda en a été retirée, portant le nombre de pays concernés à onze.



Rubrique Lecture juridiques




✔ Un arrêté du 26 septembre 2024, publié au JO du 10 octobre, met à jour les modèles d’avis d’inaptitude ou d’aptitude, d’attestation de suivi individuel de l'état de santé et de proposition d’aménagement du poste. Ces documents sont utilisés à l’issue de la visite médicale du salarié. Veillez à recourir à ces nouveaux modèles !


✔ Le ministère du Travail a diffusé deux FAQ apportant des précisions aux décrets d’application de la Loi Partage de la valeur, quant aux thématiques suivantes :

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